Entrevues Une vision pour l’avenir : Aneil Gokhale Aneil Gokhale Juin 17, 2022 10 min read Nouvelles et perspectives Entrevues Une vision pour l’avenir : Aneil Gokhale Alors que le monde qui nous entoure change, le secteur caritatifs ocial à but non lucratif doit s’adapter, et la philanthropie doit faire de même. Notre secteur constitue une facette fondamentale de la société civile, et nous renouveler est une priorité. Le statu quo ne suffit pas. Les inégalités sont omniprésentes dans nos collectivités, et nous devons intensifier nos efforts pour relever les défis mondiaux. Dans sa nouvelle série de publications, «Une vision pour l’avenir», FPC a demandé à des dirigeants d’organismes sans but lucratif de nous faire part de leurs perceptions de la situation actuelle du secteur, du rôle de ce dernier et de la direction à prendre pour assurer son avenir. Nous présenterons régulièrement de nouveaux témoignages, dans des blogues et balados, tout au long du printemps 2022. Quelles sont les trois choses qui vous motivent aujourd’hui dans le secteur caritatif à but non lucratif? En premier lieu, je mentionnerais l’incroyable engagement du personnel du secteur non lucratif envers le travail essentiel qu’il accomplit. Ensuite, l’esprit du personnel de première ligne orienté vers la collectivité. Ces personnes se heurtent continuellement à des obstacles, et les gens dépendent énormément d’elles. De plus, elles représentent et soutiennent généralement des collectivités marginalisées et racialisées. Enfin, l’ouverture d’esprit d’un nombre croissant de donateurs, qui sont prêts à changer leur façon de faire et à s’écarter des schémas traditionnels dans le domaine philanthropique. Quels sont les trois éléments qui doivent évoluer pour créer une communauté philanthropique plus durable pour tous les habitants du Canada? En ce qui me concerne, je tiens à savoir à qui l’argent est donné, à quoi on accorde la priorité et qui détient le contrôle et le pouvoir. Au Canada, 66% des ressources caritatives sont remises à 1% des organismes de bienfaisance, qui sont souvent les organismes de plus grande envergure, c’est-à-dire les hôpitaux, églises et universités. Ce 1% est important, mais il importe d’examiner de manière plus globale les problèmes abordés par ces organismes. Dans le domaine de la santé, il y a des organismes communautaires locaux à Toronto comme TAIBU ou Anishinaabe Health, qui travaillent en aval, c’est-à-dire qu’ils soutiennent des collectivités souvent ignorées, et sont essentiels pour réduire la dépendance à l’égard des hôpitaux. Visions of Science est un autre exemple, dans le domaine de l’éducation. Cet organisme aide à favoriser la réussite scolaire et le développement des jeunes issus de milieux économiquement défavorisés et marginalisés par un engagement significatif dans les domaines des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques (STEM) et de la recherche. Les donateurs qui souhaitent promouvoir l’enseignement supérieur doivent penser à contribuer ailleurs qu’aux seuls établissements d’enseignement supérieur. Ils doivent penser à l’ensemble du cycle, cardans l’état actuel des choses, la plupart des jeunes de ces collectivités ne sont même pas en mesure d’envisager la moindre éducation post secondaire. Concernant les détenteurs du contrôle, il est clair que la philanthropie est un outil du capitalisme. Nous agissons dans le cadre des structures existantes. Or, un changement important doit avoir lieu pour que davantage de dons soient versés de manière non contrôlée afin que les collectivités puissent en faire ce qu’elles jugent nécessaire. Les détenteurs du pouvoir sont souvent les conseils d’administration et la haute direction. Ils sont généralement composés d’hommes et de femmes blancs, cisgenres et physiquement aptes. Les choses changent tranquillement, mais la philanthropie n’est pas encore reflétée dans les collectivités desservies. C’est particulièrement vrai dans le cas des grandes institutions philanthropiques et à but non lucratif. Même s’il y a de plus en plus de diversité, celle-ci est absente au niveau des dirigeants et des décideurs. En fait, comme la prise de décision est souvent influencée par les expériences de vie des décideurs, si la diversité est absente parmi les décideurs, elle ne sera pas prise en compte dans les décisions. Qu’est-ce qui vous donne de l’espoir alors que nous continuons à lutter contre la COVID-19 ? Honnêtement, il est difficile de garder espoir… On peut certainement prendre la mauvaise direction et être frustrés devant tout le travail effectué et la lenteur des changements apportés. Malheureusement, tant de problèmes ont stagné ou se sont aggravés. Toutefois, je reprends confiance quand je vois certains exemples ici et là de changements profonds et significatifs. J’espère que ces exemples pourront servir de tremplin à d’autres possibilités futures. Par exemple, le fonds Black and Indigenous Futures Fund de la Fondation de Toronto. Il s’agit d’un programme de subventions créé par des leaders noirs et autochtones, dans lequel les décisions sur la destination des fonds et sur le financement de donataires non qualifiés sont prises par les collectivités mêmes, des groupes communautaires essentiels qui changent vraiment les choses, mais qui n’ont pas le statut d’organisme de bienfaisance. Le programme s’est démarqué entre autres en assumant le contrôle de près d’un million de dollars sur trois ans, en réaffectant ces fonds aux collectivités qui en ont le plus besoin et en les utilisant pour obtenir des dons de contrepartie. La manière dont les fonds sont de plus en plus investis dans une optique de rendement social et d’ESG (environnement, société et gouvernance) m’encourage également. Cela me redonne de l’espoir. Si le pouvoir d’achat des fondations s’accroît un peu, les répercussions seront certainement positives. Enfin, le travail constant du personnel dans la collectivité me donne aussi confiance. Les efforts de ces personnes nous poussent à continuer, et notre travail permet de les soutenir. On leur souhaite certainement tout le pouvoir possible. Si vous pouviez changer une chose dans le secteur à but non lucratif, ce serait quoi? Qu’est-ce que vous ne voudriez pas changer ? En ce qui me concerne, je changerais l’injustice dans le secteur. En fait, je changerais les destinataires de l’attention, de l’argent et du pouvoir. Certaines choses, comme les soins de santé, l’éducation, le logement, devraient être prises en charge par le gouvernement. Toutefois, il ne le fait pas adéquatement. S’il le faisait, les ressources accessibles au secteur pourraient alors être affectées à la qualité de vie, plutôt qu’aux besoins humains fondamentaux. La question se pose: existe-t-il un monde où la défense des intérêts peut jouer un plus grand rôle? Comment les philanthropes peuvent-ils unir leurs voix pour mieux se mobiliser afin de répondre aux enjeux essentiels? L’action des philanthropes en faveur de la satisfaction des besoins humains fondamentaux n’est pas anodine, puisque la plupart d’entre eux n’auront jamais à se soucier des leurs. Dans l’ensemble du pays, on constate que les nombreux problèmes de qualité de vie qui existent depuis des décennies sont toujours d’actualité et ne s’améliorent pas. Il faut commencer à agir et à le faire différemment. Jusqu’à présent, nous adoptons invariablement les mêmes idées et solutions (avec peut-être quelques petites retouches), mais les résultats ne changent pas, et c’est vraiment frustrant. Je ne suis donc pas sûr qu’il y ait beaucoup de choses que je garderais telles quelles. Le statu quo a abouti à ce que nous avons aujourd’hui–et ce n’est pas suffisant. Quelle est l’importance des fondations pour le bien-être des Canadiens et des Canadiennes ? Je ne suis pas toujours sûr que la population connaît notre rôle. À mon avis, les fondations au Canada représentent une étape supplémentaire et une autre couche entre la possibilité et la quête de cette possibilité. Idéalement, ça ne devrait pas être le cas du monde des fondations actuel. Les fondations représentent un pouvoir; et c’est un pouvoir que les gouvernements écoutent. Comment les fondations peuvent-elles plaider pour le changement dont nous avons réellement besoin? Je répète: le changement est nécessaire pour de nombreuses populations sans pouvoir. Si les personnes qui ont le pouvoir venaient à la défense de ces populations, on pourrait s’attendre à de réels changements. Il faut aussi pour cela que les détenteurs du pouvoir soient prêts à en céder une partie. Effectivement, il faut que ça fasse mal un peu (parfois beaucoup!) pour avoir un sens et faire bouger les choses. Quels sont les enjeux les plus urgents auxquels le gouvernement doit porter attention à l’heure actuelle en ce qui concerne le secteur philanthropique ? L’ injustice des dons et la concentration du pouvoir. Les leaders du secteur philanthropique ont le pouvoir sur ces actifs. Ils ont beau être instruits et avoir le plus grand cœur du monde, ils ne vivent pas dans les mêmes circonstances que les habitants de RegentPark à Toronto ou de East Hastings à Vancouver. Ils ne comprennent tout simplement pas. C’est impossible. Selon la structure actuelle du système, il y a un énorme fossé entre ceux qui ont du pouvoir et ceux qui n’en ont pas. Quelles sont les réformes réglementaires les plus importantes que le gouvernement pourrait mettre en place dès maintenant afin d’avoir une incidence majeure sur le secteur philanthropique? Honnêtement, je l’ignore. Il faudrait au moins assurer une représentation plus diversifiée au niveau de la direction des fondations. Quelles sont les possibles réformes réglementaires pour faire en sorte que cela se produise? Parce que si cela se produisait, nous pourrions commencer à voir quelques changements au niveau décisionnel qui transformeraient le pouvoir des fondations. Complétez ces phrases : Le secteur philanthropique de l’avenir devrait ressembler à.. Il ne peut pas demeurer comme il l’est actuellement. Le lien entre les grandes fondations et les collectivités locales doit être renforcé. Pour que la philanthropie renouvelle son contrat social avec les Canadiennes et les Canadiens, il faut… De nos jours, il est très facile d’exprimer des opinions catégoriques et des sentiments forts et on le fait beaucoup. Il importe de ne pas miner la confiance. Les personnes qui gèrent les actifs philanthropiques doivent accepter que ce sont les personnes les plus touchées par les décisions qui doivent prendre ces décisions. En fin de compte, il en résulterait de meilleures décisions et de meilleurs résultats. 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